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Channel: "LE GABON ENERVANT" OR "ANNOYING GABON"
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REACTION BY EMMANUEL NTOUTOUME NDONG ABOUT THE COLLAPSE OF THE GABONESE SOVEREIGN NOTATION. RÉACTION D’EMMANUEL NTOUTOUME NDONG À PROPOS DE L’EFFONDREMENT DE LA NOTE SOUVERAINE DU GABON

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Emmanuel Ntoutoume Ndong. Ancien élève de l'ENA de Paris, Inspecteur général des finances


Le 5 décembre dernier, l’agence de notation FITCH RATINGS a dégradé la note souveraine du Gabon,la faisant passer de « stable » à «négative » ce qui, quoi qu'en dise le ministre de l'Economie, présage de perspectives sombres à très court terme pour notre pays.

Quelques jours après, le 12 décembre courant, une autre agence de notation, MOODY’S attribuait la note honorable Ba3 au Gabon, en contradiction avec l’agence FTICH.

Réagissant à la notification de FITCH, le ministre de l’Economie s'est contenté de banaliser la nouvelle, jugeant la décision de l’agence de notation « précipitée » et « discutable », et imputant cette appréciation négative et les difficultés qui s’annoncent pour notre pays à la seule baisse du prix du pétrole, comme si tous les pays producteurs de pétrole avaient vu leur note souveraine dégradée.

L’agence FITCH tient certes compte dans sa notation de la chute brutale du prix du pétrole qui, comme chacun le sait, représente 56% des recettes budgétaires du Gabon et 80% de ses exportations. Mais elle prend aussi en considération la diminution progressive de la production du pétrole, de l'épuisement inéluctable de la manne. L’évolution de la production du pétrole au cours de ces dernières années illustre clairement cette tendance asymptotique:11,6 millions de tonnes en 2012, 11 millions de tonnes
en 2013, 10, 9 millions de tonnes en 2014).

Si l’on combine l’effondrement du prix estimé aujourd’hui à 40% et l’épuisement progressif de la ressource, on voit difficilement comment le Gabon pourrait être en mesure de maintenir l'équilibre financier du pays. Le ministre de l'Economie choisit comme variable d'ajustement la réduction de son programme d'investissement. Cette réduction massive de l'investissement public affectera pour plus d'un tiers des dépenses publiques et se ressentira brutalement sur l'activité dans notre pays.

Réagissant ensuite à la notification de l’agence MOODY’S qui attribue au Gabon la note Ba3 avec des perspectives favorables, le ministre de l’Economie n’a pas caché sa jubilation, en déclarant que cette note conforte « les autorités gabonaises dans la priorité qu’elles accordent à la gestion prudente des finances publiques dans le contexte actuel de baisse du prix du pétrole ». Mais dans le même temps, il passe sous silence les nombreux manquements du gouvernement relevés par le même rapport, notamment en matière de déficit en infrastructures, de gestion budgétaire, de répartition des revenus et des politiques sociales. Ce qui intéresse le ministre de l’Economie, ce n'est pas de savoir comment est gérée la richesse du pays, ce patrimoine commun de tous les gabonais, ni comment cette richesse est répartie entre les gabonais, mais « la confirmation du classement du Gabon au rang des émetteurs souverains les mieux notés de l’Afrique subsaharienne » Si ce n'est pas du virtuel, il faudrait trouver un autre sens à ce mot. Le ministre de l'Economie vit dans les statistiques, les gabonais vivent la réalité de la pauvreté.

Sans vouloir remettre en cause l’intégrité professionnelle de l’agence MOODY’S, l’on peut tout de même s’interroger sur la sincérité de ses données, au regard de la situation réelle du Gabon. Qui peut croire MOODY'S quand elle affirme que "les autorités gabonaises accordent une priorité à la gestion prudente des finances publiques?" Il est surprenant à cet égard que MOODY'S soit plus indulgente que la Cour des Comptes gabonaise qui, bien qu'institution "domestique", n'a eu de cesse de stigmatiser la gestion suicidaire des finances publiques par les autorités gabonaises. On ne voit donc pas où MOODY'S est allé chercher ses "perspectives de croissance, un bilan financier robuste et une faible vulnérabilité aux socs extérieurs du fait notre appartenance à la zone franc" quand il reconnait en temps l'existence "de contraintes sur le crédit dues à la dépendance de l'économie gabonaise au secteur pétrolier et à la faiblesse de ses institutions de gouvernance économique et de disparités socio-économiques".

Au plan de stabilité politique et macroéconomique MOODY'S affirme en même temps que " la scène politique gabonaise pose un risque modéré d'événements exceptionnels" et que "le pays a des difficultés à concilier les impératifs politiques, économiques, financiers et sociaux, ainsi qu'un score considéré par la Banque Mondiale comme faible au niveau de la représentativité et de la responsabilisation du pouvoir politique" autrement dit, MOODY'S voit bien un risque pour le Gabon et ce risque émane du déséquilibre "entre les attentes des populations, notamment au plan social" et "la préservation de la stabilité politique et macroéconomique dans un contexte propice aux tensions sociales, du fait d'une forte inégalité des revenus et du fait de l'érosion des recettes publiques, suite à la diminution du prix du pétrole"!

Le 19 février 2013, le Fonds Monétaire International avait prévenu les autorités gabonaises d’un séreux risque d’assèchement des revenus du pays, du fait du ralentissent de l’activité mondiale perceptible, et dont la conséquence prévisible immédiate était la diminution de la demande mondiale de pétrole.

L'institution de Bretton Wood relevait la persistance du déficit budgétaire hors pétrole, ainsi que la faible croissance du secteur privé non pétrolier. Les perspectives favorables qu’elle entrevoyait pour notre pays étaient tempérées par les aléas sur le cours du pétrole. Le Fonds recommandait alors fermement au gouvernement gabonais de mettre en œuvre « une politique budgétaire plus prudente», « la modération dans l’investissement public" et "d’engager des réformes dans l’Education et dans le marché du travail, pour mieux faire correspondre l’offre et la demande d’emplois". Le FMI pointait aussi comme point négatif les difficultés d’accès des PME aux financements.


La même année, l’agence de notation STANDARD &POOR’S a attribué la note BB- avec perspectives négatives au Gabon. STANDARD &POOR’S justifiait cette décision par la mauvaise gestion des finances publiques, estimant que le Gabon « n’avait pas encore fait ses preuves en matière budgétaire et en matière de culture de paiement, et qu’il demeure trop dépendant des revenus pétroliers » STANDARD &POOR’S, relève enfin que la relative stabilité politique dont a bénéficié le Gabon et son revenu élevé par tête d’habitant sont des atouts qui peuvent permettre à notre pays d’atteindre une croissance forte autour de 4,5% dans un futur proche (en 2013-2016), mais que cette possibilité est contrariée par le manque criard d’infrastructures, le mauvais climat des affaires (170e sur 185 pays) la corruption, la faiblesse institutionnelle, la forte dépendance du pétrole, des obstacles formels et informels à l’exportation vers les autres pays de la CEMAC et le manque de main d’œuvre qualifiée.


Malgré ces mises en garde émanant de deux des plus grandes institutions financières de la planète, malgré les rappels à l’ordre récurrents de la Cour des Comptes et les critiques l’opposition, notamment de l’Union Nationale, le gouvernement auquel appartient Régis IMMONGAULT a maintenu une politique budgétaire absurde, fondée sur des hypothèses macroéconomiques irréalistes, le tout couronné par une gestion gargantuesque des finances publiques.

C’est ainsi que dans la loi de finances rectificative 2014, alors que des signes perceptibles laissaient déjà entrevoir une contraction de l’activité économique mondiale de l’ordre de 15 à 20% par rapport à 2013, le gouvernement a tablé sur un taux de croissance de 5,1%. On sait ce qu’il en est advenu : notre pays paie aujourd’hui le prix de cette désinvolture budgétaire qui a conduit le gouvernement à engager des dépenses incompatibles avec la réalité des recettes perçues. On le voit avec les difficultés de l’Administration incapable de faire face à ses obligations financières et avec les problèmes des
entreprises dont la plupart dépendent des marchés de l’Etat.

Avec l'effondrement attendu des recettes et son incidence sur les revenus globaux de l'Etat , le gouvernement ne fera pas l'économie d'une remise à zéro de l’ensemble des hypothèses qui sous-tendent la loi de finances de l’exercice 2015. En effet, avant même d’avoir été promulgué, le budget 2015 s’avère inexécutable puisqu’il tablait sur une baisse du prix du pétrole de 20%, un baril à 96,6 dollars US et une appréciation du dollar US de 2,1% par rapport au franc CFA. Or, le prix du pétrole s’est replié de 40%.

Rappelons pour mémoire qu'une situation semblable s'est déjà produite dans notre pays. C'était en 1986. Cette année là, notre pays avait dû faire face à une diminution la production de pétrole de 50% par rapport à1985. Cela s’est traduit par une grave crise économique et financière qui a duré neuf, jusqu’en 1994.

Depuis quatre ans, de 2010 à 2014, Ali Bongo et ses gouvernements successifs ont bénéficié d’une conjoncture économique et financière particulièrement favorable. Une production pétrolière, certes en baisse tendancielle, mais tournant tout de même au tour autour de 10,9 millions de tonnes en 2014, un prix élevé du baril stabilisé entre 90 et 100 dollars US en moyenne annuelle, jusqu’en début 2014, des budgets annuels colossaux de l’ordre de 3000 milliards de francs CFA en moyenne, des taux de croissance élevés de l’ordre de 5 à 6% et une inflation contenue sous le seuil communautaire de 3%. Cette conjonction providentielle de facteurs favorables qui devait donner une impulsion décisive au Gabon et assurer son décollage économique, a été malheureusement gâchée par l’amateurisme et l’incompétence du pouvoir dit « émergent » et par son incontinence financière.

S'agissant des investissements rien, ou presque, de ce qui a été annoncé n’a vu le jour, surtout si l’on considère que les réalisations constatées ces dernières années, notamment en matière de routes dans le sud du pays ne coïncident qu’avec l’arrivée à terme des derniers chantiers lancés par le président Omar Bongo et dont les financements, étaient déjà disponibles.

L’on ne peut donc que s’étonner de ce qu’aucun des grands chantiers effectivement lancés par le pouvoir dit « émergent » n’ait à ce jour abouti. Quelques exemples emblématiques: les gabonais attendent toujours les 5000 logements annuels promis par Ali Bongo à l’entame de son mandat. Un tel projet était de nature à booster la croissance dans le secteur de la construction et à générer de nombreux emplois. Pourquoi ne parle t- on plus du projet de construction de l’Aéroport International d’ANDEM sur la route de KANGO ?

A Libreville, les habitants se demandent pour quelles raisons le chantier du Champs Triomphal qui devait transformer la physionomie de la capitale gabonaise est-il à l’arrêt depuis des mois, et pourquoi les cinq échangeurs promis, maquette à l’appui, se sont-ils transformés en trois simples ponts ? Et pourquoi les travaux du stade omnisport président Omar Bongo qui devait abriter la finale de la Coupe d’Afrique des Nation de l’édition 2012 peinent tant à s’achever ? Ils s’étonnent de la lenteur, inexpliquée, des travaux de l’autoroute PKA 15 – NTOUM dont la durée d’exécution était fixée à 24 mois ? Ils voudraient savoir combien se salles de classes ont été construites et combien d’hôpitaux ont été livrés en quatre ans ? Dans quelle proportion le chômage, notamment des jeunes diplômés a reculé, et pourquoi avec une inflation officiellement évaluée à 2,5% de moyenne annuelle, en de ça de la norme communautaire, fixée à 3%, la vie est-elle si chère dans leur pays ?

S'agissant de la politique sociale, les gabonais veulent comprendre pourquoi 30% d’entre eux vivent en dessous du seuil de la pauvreté absolue et 60% d’entre eux dans la pauvreté relative, pendant que la richesse du pays croît de 5% en moyenne par an depuis quatre ans? Pourquoi 43% de la population gabonaise vit encore avec un revenu autour de 10 000francs CFA par mois et 21% avec un revenu mensuel autour de 100 000 francs CFA dans un pays de 1. 500 000 habitants et qui produit 3000milliards de francs CFA de richesse supplémentaire chaque année depuis quatre ans? Ils s’étonnent qu’avec une croissance soutenue de 5% en moyenne annuelle depuis quatre ans, le chômage des jeunes, notamment les diplômés, tourne toujours autour de 30% ? Ils aimeraient enfin savoir où en est notre pays avec les OMD, dont l’échéance avait été fixée l’horizon de l’année 2015 ?

Là où Régis IMMONGAULT fait preuve de cynisme ou de cécité volontaire, c’est quand il nie l’existence d’une crise politique au Gabon susceptible de compromettre l’échéance électorale de 2016. Alors ue tous les observateurs y compris l'ONU reconnaissent que le Gabon est en bien en crise, et que cette crise est potentiellement explosive comme le montre l'actualité, le ministre de l’Economie estime, lui, que le Gabon « est stable » et que « toutes les conditions sont réunies pour que l’élection de 2016 se passe sans encombre ». Il ne voit pas les grèves qui se déclenchent jour après jour dans presque tous les secteurs de l’administration et du secteur privé et qui sont de nature à paralyser le pays. Sous l’ère du président Omar Bongo, la stabilité politique combinée à des taux de croissance élevés ont été de réels atouts qui auraient pu permettre à notre pays de se développer de façon plus harmonieuse et plus rationnelle. Mais la mauvaise gouvernance financière, dénoncée sous le père par tous les observateurs, s’est aggravée sous le « fils », avec en prime une politique économique chaotique qui ne semble n’avoir ni tête ni queue.

Les politiques structurelles initiées par Ali Bongo sont incohérentes et désarticulées, tant dans leur élaboration que dans leur mise en œuvre. Par ce qu’elles ne procèdent pas une vision partagée des gabonais sur l’avenir économique et social de leur pays, les recettes proposées les émergents gabonais vont à l’encontre de ce qui, pour les populations, est l’essentiel. Comme chacun peut l’observer, les stratégies sectorielles des différents départements ministériels se caractérisent par une absence flagrante de transversalité, de hiérarchisation globale, de vision commune. Ce qu’ils proposent, c’est un assemblage désarticulé de stratégies sectorielles vide toute cohérence et de tout contenu opérationnel. Or, en matière de gouvernance économique, les politiques structurelles doivent avoir une logique, procéder d’une hiérarchisation pertinente, d’une démarche méthodologique appropriée, d’une vision globale basée sur une matrice opérationnelle optimisée.


Emmanuel NTOUTOUME NDONG

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